L’accueil du printemps

Devant sa fenêtre grande ouverte, elle prend de grosses bouffées d’air tiède. Elle boit les rayons du soleil autant qu’elle le peut et ses yeux se régalent des cerisiers qui fleurissent à chaque fois qu’elle sort de chez elle. Elle a eu si froid tout l’hiver, elle se délecte de l’arrivée du printemps.

L.W.

Chez Isaure

Entrer chez Isaure, c’est un peu comme rentrer dans un rêve. Le temps n’existe plus, les époques s’entremêlent, un chat passe. Sur la tapisserie, des cygnes s’ébattent. On s’assoit sur des coussins au sol, on pose. Et lorsque l’on en ressort, le Château est là, à gauche, pour ne pas nous laisser partir trop vite de cet univers rêvé.

L.W.

Le Magic City

C’était l’entracte. Elle pouvait enfin souffler un peu, et surtout, savourer un instant de solitude. Sitôt seule, son cerveau en ébullition se calmait. Elle aimait les montées d’adrénaline que lui procurait la scène ; il lui était même difficile de s’en passer. Et pourtant, dès qu’elle passait de l’autre côté du rideau, un soulagement agréable s’emparait d’elle.

L.W.

Le coup de vent

Sur sa terrasse, elle ne faisait rien. Rien qu’exister, parce qu’aucune obligation ne la forçait à accomplir la moindre action. Elle appréciait l’ennui, qui engendrait chez elle une certaine lascivité. Elle n’avait même pas conscience que cet ennui était un luxe. Mais soudain, tandis qu’elle observait l’un des nuages prendre la forme d’un petit diable, elle se sentit observée. Elle se retourna, elle le vit, et le vent se mit à souffler.

L.W.

Valency, été 1927

Elle aimait les balades au parc. Valency était sa petite bulle de nature au milieu de la ville, à côté de chez elle. On pouvait presque y croire, une fois oublié le son de la ville derrière les arbres. Lieu de confidences, l’après-midi, parfois d’ivresse, le soir, elle s’y sentait bien. Certains recoins prenaient les airs d’un tableau d’impressionniste. Ce dimanche-là, elle sortait pour la première fois avec la robe qu’elle venait de terminer. C’était la fin de l’été, un orage avait éclaté l’après-midi durant. Déjà, le sol était sec.

L.W.

À la librairie

Depuis qu’elle sait lire, elle aime les livres. Ils lui permettent de s’immiscer dans la vie de personnes à chaque fois différentes. De vivre leurs émotions. C’est une sorte de voyeurisme, elle se dit. Elle peut les observer, les suivre. Se laisser inspirer par celles qu’elle admire. Peut-être grandit-on soi-même un tout petit peu à chaque livre qu’on lit ?

L.W.

Noyée

Lorsque sa tête s’enfonça dans l’eau, tout se tut. Elle n’entendit plus gronder le monde du dehors. Elle n’entendit plus les injustices. Les incohérences. La haine. Elle fut envoloppée d’un voile de silence épais et sentit ses propres souffrances se diluer peu à peu dans le fluide tiède dans lequel elle se noyait.

L.W.

Hantée

Par la fenêtre, elle guettait. Elle cherchait une issue. Un passage, vers ailleurs. Les carreaux étaient brisés, mais elle était incapable de s’enfuir. Fuir cette maison, disparaître. Quelque chose la retenait. La lumière du dehors était belle à regarder. Mais à l’intérieur, l’obscurité était rassurante. Les livres jaunis qui jonchaient le sol lui étaient familiers. Elle aimait les mots sur leurs pages. Le bois qui craque et le vent qui siffle lui tenaient compagnie. Une compagnie apaisante. Alors que dehors, le monde hurlait.

Dehors, on disait que la maison était hantée.

L.W.

Elle et je

Elle te regarde ; je rêve.
Elle est avec toi, je suis ailleurs.
Sa peau est chaude, la mienne est de glace.
Ses yeux te fixent, ils regardent en toi. Mon regard s’évade, loin.
Son esprit est calme. Dans ma tête, tout n’est que mouvement.

Je te regarde ; elle rêve.
Je suis avec toi, elle est ailleurs.
Ma peau est chaude, la sienne est de glace.
Mes yeux te fixent, ils regardent en toi. Son regard s’évade, loin.
Mon esprit est calme. Dans sa tête, tout n’est que mouvement.

Elle sait qui je suis.
Je sais qui elle est.

L.W.